Sans négliger les obligations règlementaires que l’entreprise doit assumer, il nous semble indispensable de rouvrir le champ de réflexion sur la pénibilité, afin que la démarche soit utile à l’égard des questions qui se posent dans l’organisation. La pénibilité peut s’analyser à partir de trois dimensions. La première est relative à un sentiment de pénibilité au regard d’une aspiration insuffisamment réalisée. La deuxième correspond à la sensation de pénibilité éprouvée en rapport à une capacité d’agir dans certaines situations. Cette capacité d’action est dépendante d’un état physiologique et psychologique – évoluant avec l’âge – et de la manière dont les capacités fonctionnelles sont mobilisées au travail – celles-ci évoluant aussi avec l’âge. Enfin une dernière dimension est relative à une difficulté – éprouvée ou crainte – de trouver les moyens de compenser les savoir-faire déclassés par les changements. Ces dimensions peuvent se combiner et composer ensemble un « coût » pour le sujet en termes de santé. Dans une logique de compensation, l’objectif sera en quelque sorte d’équilibrer le « coût » engendré par la pénibilité du travail avec les bénéfices retirés par la personne. Dans une logique d’exposition au risque, l’objectif sera de la réduire afin d’en limiter les effets pour la personne.
L’approche de la pénibilité développée par ATEMIS va plus loin. Elle interroge la manière dont les degrés d’acceptation de la pénibilité se rapportent directement à la création de valeur, qui est engagée à travers elle et au modèle économique. Cette valeur présente une double dimension : une dimension économique pour l’entreprise et une dimension subjective pour l’individu, qui concerne la possibilité de se réaliser dans l’activité. Ces deux registres économique et subjectifs sont à prendre à la fois dans le moment actuel (effets de pénibilité immédiats) et dans une perspective diachronique, de long terme (effets d’usure ou risque de désinsertion dans les parcours professionnels). Dans cette optique, la question de la pénibilité c’est donc aussi la question de la valeur accordée au travail, le sens et les raisons d’agir que l’entreprise accorde au travail. C’est le rapport entre les registres de la dépense (efforts) et les registres de la « valeur » (effets utiles, réalisation) qu’il s’agit d’instruire et d’évaluer, de débattre et d’orienter par l’action managériale. La question de la reconnaissance du sens/effets utiles/efforts du travail peut devenir un levier pour éviter l’épuisement des ressources. En ce sens, la valorisation des ressources immatérielles est un enjeu de santé pour l’entreprise, y compris d’un point de vue économique.
Cette démarche réflexive et opérationnelle s’appuie sur l’analyse du travail réel, pour faire émerger la manière dont le travail est pensé au sein de l’organisation et la manière dont il est vécu dans le parcours des professionnels.
Dans la perspective de favoriser des conditions qui permettent de renforcer les enjeux roboratifs du travail et de réduire les facteurs de pénibilité, ATEMIS propose plusieurs axes de travail :
- Evaluer la pénibilité, au travers de l’analyse du travail, à savoir le rapport entre la charge de travail et les moyens (ressources, compétences, temps, espaces de délibération, ). Cette évaluation permettra de faire émerger ce qui la crée (insuffisance de moyens, conflit éthique, etc.).
- Outiller le management sur les enjeux subjectifs et économiques du travail et en décrypter le sens. En ce sens, il s’agira d’accompagner le management dans les perspectives qu’il ouvre aux enjeux du travail. Cela suppose de s’appuyer sur le modèle économique pour valoriser le travail dans son utilité sociale ainsi qu’à l’échelle de l’entreprise.
- Travailler sur le modèle économique afin d’en comprendre les tenants et aboutissants et éventuellement de l’ajuster aux enjeux du travail.